Cette chronique traite du patrimoine toponymique de la Ville de Sherbrooke. Ces chroniques hebdomadaires nous viennent de Jean-Marie Dubois, membre émérite de la Société de généalogie des Cantons-de-l’Est, et de Gérard Coté, membre de la Société d’histoire et du musée de Lennoxville-Ascot. Cette semaine, voici la rue Éva-Tanguay, une nouvelle rue du Plateau McCrea.

Temps de lecture estimé – 5 minutes

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Éva-Tanguay, Rue

Chanteuse de vaudeville estrienne (1878-1947)

Photo : courtoisie de Jacques Robert, Dudswell

Hélène Éva Tanguay est née à Marbleton (Dudswell depuis 1995), le 1^er août 1878 et elle est baptisée le 25 mars 1880 en la cathédrale de Saint-Michel à Sherbrooke. Elle est la cadette des quatre enfants d’Adèle Pageau (Keeseville, New York ca 1841—Keeseville 09-04-1899) et du docteur Joseph Octave Tanguay (ca 1839—Holyoke, Massachusetts 06-09-1886). Ceux-ci s’étaient épousés en la cathédrale de Saint-Hyacinthe, le 1^er décembre 1860 et étaient alors venus s’établir à Marbleton. Lors du recensement de 1871, ils sont à Saint-Hyacinthe et deux autres de leurs enfants sont baptisées à Sherbrooke en 1861 et 1868. En 1882, la famille s’exile à Holyoke, au nord de Springfield, au Massachusetts. Éva n’a que huit ans à la mort subite de son père. La famille alors démunie survit avec difficulté, Adèle gagnant de quoi la faire vivre en faisant des travaux domestiques. Friande des concours d’amateurs à la salle d’Holyoke, Éva décide de s’y présenter elle-même en 1887 et remporte le premier prix.

En 1888, elle remplace au pied levé une jeune fille malade d’une troupe itinérante de passage à Holyoke. Elle se joint alors à la troupe qui parcourt le pays. En 1896, son nom circule dans les cercles artistiques de New York. Sa célébrité gagne les grandes villes des U.S.A et du Canada. Devenue « la fille qui a rendu le vaudeville célèbre », elle est la vedette de spectacles comme The Office Boy (1903), The Sambo Girl (1904) et A Good Fellow (1906). En 1903, elle éblouit lors de la présentation de The Chaperones (1903) quand elle chante I Don’t Care, un air libérateur et rapidement un grand succès. C’est d’ailleurs le seul enregistrement qui existe de ses chansons. On parle cependant de sa fougue et de son mauvais caractère derrière le rideau. Avec des chansons comme To Go Wild With Me, et Go as Far As You Like, elle proclame sa liberté et conteste les tabous féminins de l’époque.

Au sommet de sa carrière, elle gagne 3 500 $ par semaine, une fortune à l’époque, mais perdra presque tout au Krach boursier de 1929. Sa santé se détériore en 1930 et elle perd la vue en 1932. Elle recouvre bientôt la vue à la suite d’une opération financée par des amies. Elle décède pratiquement dans l’oubli d’une hémorragie cérébrale, à Hollywood en Californie, le 11 janvier 1947. Elle est inhumée au cimetière Hollywood Forever en Californie. Sa carrière a inspiré le film The I don’t care girl sorti en 1952. Une plaque commémorative à son nom est dévoilée en 2007 par l’Association touristique et culturelle de Dudswell.

Cette rue est ouverte en 2021 dans le développement du Quartier du Plateau (devenu Plateau McCrea) du Groupe Custeau. Le nom fait partie d’un système odonymique sur les artistes québécois. Il est attribué par le conseil municipal de Sherbrooke lors de sa réunion du 3 juin 2019. Le toponyme est officialisé par la Commission de toponymie du Québec, le 9 décembre 2021.

Renseignements

Bouchard, Marie-Christine (2007) De Dudswell à Broadway : L’incroyable destin de la grande Éva Tanguay. La Tribune, vol. 98, 25 juillet 2007, p. 15.

Cotnoir, Chloé (2020) La rock star de Marbleton. La Tribune, vol. 111, n^o 43, 4 juillet 2020, p. 14.

Dubois, Jean-Marie and Coté, Gérard (2021) Éva-Tanguay Street in Sherbrooke, named after a famous vaudeville singer from the Townships. The Record, 17 décembre 2021, p. 9.

Fiche de renseignements pour les propositions de nouveaux toponymes soumise à la Ville de Sherbrooke par les PÉPINES, le 7 mars 2016.

Gardner, David (2007) Tanguay, Eva. L’Encyclopédie canadienne. https://www.thecanadianencyclopedia.ca/fr/article/tanguay-eva, consulté le 13 septembre 2019.

Généalogie Québec, Famille Tanguay Fichiers Lafrance et Connolly, https://www.genealogiequebec.com/membership/fr/connolly, consulté le 13 septembre 2019.

Geni (2019) Mary Adele Tanguay. https://www.geni.com/people/Mary-Adele-Tanguay/6000000007282264977, consulté le 13 septembre 2019.

Recensement du Canada de 1871 (Saint-Hyacinthe).

Robert, Jacques (2017) Marbleton – Éva Tanguay. In Beaulieu, Denis (réd.) Visages estriens – Hommage à nos gens. Société de généalogie des Cantons-de-L’Est, Sherbrooke, p. 144-145.

Savary, Karine (2019) Le cyclone sur deux pattes. La Tribune, vol. 110, n^o 46, 15 avril 2019, p. 21.

Société de généalogie des Cantons de l’Est (1994) Cathédrale St-Michel de Sherbrooke : Naissances 1834-1993. Sherbrooke, p. 521.

Société de généalogie des Cantons de l’Est (1995) Cathédrale St-Michel de Sherbrooke : Sépultures 1834-1992. 2^e édition, Sherbrooke, p. 355.

Gérard Coté (Société d’histoire et du musée de Lennoxville-Ascot) et Jean-Marie Dubois (Université de Sherbrooke)

28 décembre 2021

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