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Les Filles du Roy débarquent en Nouvelle-France !

Dans le cadre de notre programme de conférences de l’automne, nous accueillons demain, mardi 26 septembre, notre première conférencière de la saison, Madame Danielle Pinsonneault de la Société d’histoire des Filles du Roy. Elle sera accompagnée de Madame Nathalie Lagassé de Sherbrooke.

Même si la région des Cantons-de-l’Est n’a pas été un des foyers principaux d’intégration des Filles du Roy en Nouvelle-France au 17e siècle, presque tous les québécois ont des Filles du Roy à l’origine de leurs familles.

Notre conférence se déroule quelques jours seulement après le 22 septembre qui est la journée commémorative des Filles du Roy. Ce serait en ce jour de l’année 1663 qu’arrivait à Québec le premier contingent de ces femmes courageuses qui sont devenues les mères de la nation.

Afin de mieux vous préparer à cette conférence qui promet d’être des plus intéressantes, Madame Pinsonneault a bien voulu participer à notre nouvelle plateforme de partage qu’est L’Entraide numérique et a gracieusement contribué cet article que nous vous offrons aujourd’hui. Nous l’en remercions.

Dans cet article, Madame Pinsonneault retourne plus de 350 ans en arrière pour rappeler le contexte historique des Filles du Roy au début de la Nouvelle-France pour ensuite nous raconter l’aventure de la Société d’histoire des Filles du Roy.

Un article très intéressant que nous vous recommandons fortement de lire.

Temps de lecture estimé – 14 minutes

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Les Filles du Roy débarquent en Nouvelle-France !

Depuis 1663, quand le navire approche de Québec, la population manifeste sa joie avec enthousiasme, voyant ces femmes débarquer du navire, s’asseoir dans une barque et s’approcher de la grève. L’émotion est à son comble quand elles mettent pied à terre. On les attendait depuis des lunes et des lunes !

Il y avait de 6 à 14 hommes pour une femme, selon les endroits. Les hommes engagés depuis 3 ans dans la colonie désiraient se marier pour la plupart d’entre eux. Ils auraient alors droit à une terre concédée, qu’ils pourraient défricher, habiter et, plus tard, léguer à leurs enfants!  Quelle chance incroyable !  Combien de lettres les personnes influentes avaient-elles expédiées au roi lui demandant instamment d’envoyer des filles à marier en Nouvelle-France ! Enfin, elles arrivaient…  

Elles arrivaient, oui, mais dans quel état ! Elles étaient maigres, faibles, titubant, s’accrochant l’une à l’autre pour ne pas tomber. Tous savaient d’expérience ce qu’elles avaient vécu. Et comprenaient leur attitude et leurs gestes. Ces pauvres femmes auraient un grand besoin de soins attentifs, de bonne nourriture, de véritable repos.

Une fois remises sur pied grâce aux bons soins des Sœurs Ursulines ou des sœurs Augustines, les sœurs soignantes de l’Hôtel-Dieu, plusieurs d’entre elles devraient repartir. Il avait été décidé que les 2/3 des Filles demeureraient dans la région de Québec, la plus populeuse, et que les autres se rendraient plus loin, à Trois-Rivières et Ville-Marie. Celles qui devaient s’y rendre ou voulaient retrouver des gens de leur famille montaient dans un canot pour un autre voyage, vers Trois-Rivières ou Ville-Marie.  Elles savaient certainement que ce voyage comportait de grands risques à cause des attaques iroquoises plus fréquentes dans cette partie du fleuve.

Les hommes de confiance chargés de pagayer, de nourrir et de protéger les personnes à bord, de jour comme de nuit, au fil des cinq ou six journées nécessaires pour rejoindre l’ultime point d’arrivée, soit Ville-Marie, connaissaient fort bien la situation. Dès que le soleil baissait, on se dirigeait vers la rive, après avoir minutieusement regardé partout, afin d’organiser le campement, le frugal repas du soir et les quarts de veille de la nuit. Celle-ci serait courte. Tous, ou presque, allaient dormir avec une couverture sous les canots renversés.  Des yeux avertis allaient sans arrêt scruter les berges et le départ aurait lieu dès le lever du soleil.

Passé Trois-Rivières où quelques filles débarquaient, la portion du fleuve la plus dangereuse allait s’ouvrir, dès l’apparition des nombreuses îles du côté nord du fleuve (Lac St-Pierre), cachettes par excellence, puis le canal étroit menant vers Ville-Marie. Que de sueurs froides!

L’histoire du peuplement de la colonie par les Filles du Roy s’est poursuivie tant bien que mal. En onze ans, de 1663 à 1673 y compris, 764 Filles ont débarqué en Nouvelle-France. Quelques-unes ne se sont pas mariées, d’autres sont retournées en France dans les années qui ont suivi, mais ces femmes fortes et courageuses ont mis au monde tellement d’enfants qu’en 1683, la population avait triplé!

Nous pouvons affirmer que la perception tordue qu’avaient les gens des Filles du Roy a radicalement changé ! Mais tout n’est pas gagné. Il reste beaucoup à faire.

Toutefois, l’installation sur « des terres en bois d’boutte » le long du fleuve, la seule route à l’époque, avec une hache comme outillage, abattre des arbres pour construire sa cabane au mieux de sa connaissance, la renchausser pour l’hiver, quitte à devoir en boucher les interstices souvent par la suite, économiser la farine et autres provisions données pour passer l’hiver et le printemps, apprendre l’hiver et ses exigences, se débrouiller seuls, tout cela se révélait un dur apprentissage.

On découvre les Filles du Roy au XXIe siècle

Quelques trois cent cinquante ans plus tard, Madame Irène Belleau, découvre ce qu’on dit de la femme de son ancêtre, Blaise Belleau dit Larose : elle est une Fille du Roi ! Surprise. Qu’est-ce que cela veut dire?  Suite à ses recherches passionnées, elle apprend qui elles sont, d’où elles viennent et pourquoi elles sont venues en Nouvelle-France. Elle le raconte à d’autres personnes férues d’histoire. Cela sera le début d’une belle histoire, la naissance de notre société d’histoire, la Société d’histoire des Filles du Roy.

Nous décidons qu’il est urgent de pousser plus loin les recherches afin de pouvoir dire fièrement à toutes et tous, que le roi Louis XIV avait donné une mission à ces femmes, celle de venir s’y marier et fonder famille, bref, de « mettre au monde un nouveau monde ». Et qu’elles ont bravement réalisé la mission confiée !

Le premier épisode

Lors du 400e anniversaire de la ville de Québec en 2008, notre petit groupe s’est joint à l’Association de famille des Belleau dit Larose pour mettre la dernière main au colloque sur les Filles du Roi que l’association préparait.  L’enthousiasme nous portait ! Enfin nous pourrions expliquer à la population ce que nous venions de découvrir.

Et dire que certains affirmaient encore : « L’histoire, c’est plate, cela n’intéresse personne ! ».

Plus de 400 personnes y ont participé !  Elles ont découvert entre autres, que la Nouvelle-France n’avait pu naître et survivre des seules mains des centaines d’hommes qu’envoyait alors la France pour bâtir sa colonie.  La décision du roi Louis XIV d’envoyer 764 femmes en (11) onze années successives et parce que ces femmes y ont mis leur cœur et toutes leurs énergies allait changer la situation du tout au tout.          

Sans elles, la Nouvelle-France n’aurait pas vécu.

Elles ont littéralement sauvé la Nouvelle-France!

Cette année, iI y a 350 ans, les 53 dernières Filles du Roy à venir de France débarquaient à Québec. Le roi Louis XIV en avait décidé ainsi.

La naissance

Ensemble, nous avons formellement donné naissance à la Société d’histoire des Filles du Roy à l’été 2010. Nous nous sommes mises au travail afin d’écrire les biographies des 36 premières femmes envoyées en Nouvelle-France par le roi Louis XIV, arrivées en septembre 1663, quatre (4) mois (moins 3 jours) après avoir quitté le port de La Rochelle!

Un beau jour en 2012, nous avons compris tout à coup que l’arrivée des 36 premières Filles à marier datait justement de 349 ans…! L’année suivante, il y aurait 350 ans! Un événement à souligner de façon grandiose. Une date à souligner dignement. Il faut dire que nous n’avions pas d’argent. Notre société d’histoire n’était pas connue ! Des embûches majeures. Soit!

Mais les projets ne manquent pas ! Nous mettons sur pied divers événements et activités pour ramasser de l’argent. Notre confiance est communicative. Nous allons organiser des commémorations qui vont ébranler les deux rives du Saint-Laurent, là où, avec courage, elles se sont installées avec leur mari ! Nous allons incarner ces 36 Filles du Roy! Nous allons aller marcher dans les pas de « nos toutes premières grand-mères » en France, là d’où elles sont parties ! Et quoi encore!

Le 350e anniversaire de l’arrivée du premier groupe

Qualifié d’événement commémoratif ayant le plus d’envergure depuis les dix dernières années par le Mouvement national des Québécois (MNQ) en 2016, notre programme a été réalisé avec un vif succès !      

Après une solide formation de nos jumelées qui s’est étalée de septembre 2012 à mai 2013, commence en juin 2013, le voyage de mémoire en France d’une durée de 10 jours, organisé avec l’appui de la Commission franco-québécoise sur les lieux de mémoire communs (CFQLMC-France), tant au Québec qu’en France. Se suivent conférences, dévoilement de plaques, rencontres d’experts, visite de la Salpêtrière qui fêtait cette année-là un 400e anniversaire[1], de Rouen, Caen, Mortagne-en-Perche, où nous avons eu la joie de rencontrer Yves Landry et lieu d’origine de plusieurs familles arrivées bien avant les Filles du Roy, Dieppe, Niort, La Rochelle, l’Ile d’Oléron et autres.

Au mois d’août suivant, sur un voilier rebaptisé L’Aigle d’Or, les Filles du Roy quittent Rimouski, s’arrêtent un moment à Tadoussac, puis à Saint-Jean-de-l’Ile-d’Orléans, où le seigneur Jean Mauvide les reçoit. Le voilier file ensuite vers Québec où une foule incroyable les attend tout autour du Bassin Louise.

Photo à St-François de l’Île d’Orléans. Source : Société d’histoire de Filles du Roy

 C’est le délire! Trois jours à discuter, raconter, chanter avec la population dans le cadre des Fêtes de la Nouvelle-France. Puis, départ vers les Trois-Rivières où les Filles sont attendues sur le quai et sont reçues avec chaleur. Le lendemain, départ vers Sorel qui nous accueille et nous font connaître leurs lieux historiques et leurs îles envoûtantes. Deux jours plus tard, en route pour Montréal : une arrivée mémorable dans les hourras et les acclamations d’une foule de plusieurs milliers de personnes !  L’émotion est aussi vive dans le bateau que sur le quai! Accueillies par la Maison Saint-Gabriel, rencontre de prétendants, repas du soir somptueux et copieux à souhait, nous étions comme dans un rêve. Une soirée inoubliable ! Suivront, cet été-là, plusieurs autres commémorations, entre autres, sur la terre de Charles Allaire et de Catherine Fièvre sur la pointe d’Argentenay (Ile d’Orléans), à Batiscan, Champlain et Ste-Anne-de-la Pérade.

La SHFR a grandi

En cette année 2023, il y a maintenant 13 ans que la SHFR est née. Elle a grandi dans tous les sens du terme. Mais son objectif principal demeure le même, soit faire connaître ces femmes admirables.

Faire en sorte que toutes et tous au Québec et dans les provinces voisines où leurs enfants et petits-enfants se sont déplacés et vivent encore, comprennent et reconnaissent dans toute son ampleur, le rôle capital qu’elles ont joué dans la vie et la survie de la Nouvelle-France.

Nous pouvons affirmer que la perception tordue qu’avaient les gens des Filles du Roy a radicalement changé ! Mais tout n’est pas gagné. Il reste beaucoup à faire.

Nous poursuivons annuellement les formations de nouvelles jumelées, ces femmes qui ont le goût d’incarner une Fille du Roy, de connaître la vie qui a été la sienne avant de quitter la France, et celle qu’elle a vécue dans un coin de pays de ce côté-ci de l’Atlantique, donnant naissance à une famille nombreuse, travaillant d’une noirceur à l’autre dans la maison et au dehors avec son mari, parfois même avec la peur au ventre. De nombreux contacts ont été créés avec les comités d’organisation des célébrations du 350e anniversaire de plusieurs municipalités en 2022 et 2023. 

Nous souhaitons réaliser des activités porteuses de mémoire et de fierté avec les organisations mises en place, partout où on veut rendre hommage à la détermination, à la débrouillardise et au courage de nos « toute premières grand-mères! »

Cette année, iI y a 350 ans, les 53 dernières Filles du Roy à venir de France débarquaient à Québec. Le roi Louis XIV en avait décidé ainsi.

La Nouvelle-France entamait alors une nouvelle ère de formidable croissance de la population, mais aussi du défrichement des terres et du développement de l’agriculture.

Nous voulons rapatrier notre histoire, nous l’approprier et, avec passion, la faire connaître, la faire vivre et dans la joie, attiser notre fierté !


[1] Plus précisément, La Salpêtrière fêtait les 400 ans de son ancêtre, l’Hôpital de la Pitié fondé en 1612 pour recueillir les mendiants et les vagabonds.

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