La revue L’Entraide généalogique fête ses 45 ans en 2023-2024. Plus de 170 numéros ont été publiés de 1978 à 2023. Nous profitons du lancement de L’Entraide numérique pour offrir une sélection un peu aléatoire d’articles intéressants qui demeurent encore très pertinents quelques décennies plus tard. Au-delà de cette série liée au 45e anniversaire de la revue, nous comptons aussi publier d’autres articles de façon régulière pour mettre en valeur nos riches archives accumulées à travers les années.
Voici donc un article de Gilles Lapierre, écrit dans le tout premier numéro de 1978-1979 aux pages 60 à 62. Il est consacré à la valeur de la monnaie au début de la Nouvelle-France.
Temps de lecture estimé – 7 minutes
*****

Premier numéro de L’Entraide généalogique – Volume 1 Numéro 1 – 1978-1979 d’où est extrait cet article de Gilles Lapierre qui débutait à la page 60 du numéro.
Il arrive parfois, lors de recherches sur un de nos ancêtres, qu’en feuilletant un livre d’histoire, un vieux manuscrit – que ce soit un contrat notarié, un testament ou un inventaire – de se retrouver face à des sommes d’argent dont on ne connaît pas trop la valeur: livres, écus, sols, etc… Pour éclaircir un peu ce problème, voici la liste de quelques monnaies, populaires à l’époque:
- le denier
- le sous ou sol
- la livre ou franc
- l’écu, monnaie d’argent, et
- le louis, monnaie d’or
L’équivalence de ces pièces entre elles figure ainsi:
- 12 deniers font 1 sou ou sol
- 1 livre (franc) vaut 20 sous (sol) (1)
- 1 écu vaut 3 livres
- 1 louis vaut 20 livres
- 1 pistole vaut 10 livres (1)
Les premiers colons étant très pauvres, n’avaient apporté avec eux que très peu d’argent, qui fut vite épuisé. En 1663, il n’y avait plus aucune espèce sonnante au pays. Pour compenser ce manque de monnaie courante, les habitants se mirent à utiliser le CASTOR comme monnaie d’échange : il se vendait 4 francs la livre, la peau seulement. On pouvait effectuer l’opération à tous les magasins de la Compagnie.

Pièces de monnaie – Source: Éditions Septentrion
Avec l’arrivée des soldats, en 1665, l’argent se mit de nouveau à sonner. Mais ce n’était pas encore suffisant, car les pièces ne restaient pas en circulation. On continua donc de négocier avec le castor. En 1669, on ajouta le blé qui valait 4 livres le minot. Et puis, en 1674, ce fut au tour de la peau d’orignal, évaluée à 3 livres environ.
En l’année 1685, De Meulles établissait la « monnaie de cartes » dont voici une brève histoire. En 1674, le Roi avait donné l’ordre que tous les comptes, achats et paiements divers, devaient être soldés en argent sonnant. Pour comble, en 1684, il envoie des soldats au pays et ordonne de les faire vivre; mais il avait oublié leur paie !… C’est à ce moment que De Meulles eut l’idée de la MONNAIE DE CARTES, et qu’il la mit effectivement en circulation. Le système fonctionnait comme suit : on se servait de cartes à jouer ordinaires ; chacune d’elles portait le sceau de l’Intendant, sa signature et celle du Trésorier. La première évaluation était de 4 livres pour une carte entière ; une demi-carte valait 2 livres, et le quart de carte, quinze sous. On l’échangeait pour des espèces sonnantes aussitôt qu’on pouvait s’en procurer, puis l’on détruisait la carte ainsi annulée. Cette monnaie fut très populaire au pays jusqu’en 1717 (2).

Monnaie de cartes – Source: Éditions Septentrion
Chacun avait son gagne-pain et était rémunéré selon sa fonction. Ainsi, en 1653, un chirurgien gagnait annuellement 150 à 200 livres ; un menuisier, 100 livres ; un charpentier, 75 à 100 livres ; un armurier et ouvrier, 100 livres ; un armurier et serrurier, 80 livres ; un serrurier, 75 livres ; un armurier défricheur, 75 livres ; un maçon, 80 livres ; un cordonnier 60 livres ; et un tailleur d’habits, 60 livres (8).
Que pouvait-on acheter avec cette monnaie ? En 1709, un cheval se vendait 40 livres, et une belle bête, jusqu’à 100 livres (3). Toujours en 1709, une vache valait 50 livres, un mouton 5 livres (5), un cochon moyen – c’est-à-dire de 150 à 200 livres – 15 livres (3).
Les peaux et les fourrures étaient un élément vital de subsistance pour les colonisateurs. En 1715, par exemple, la peau crue d’élan valait 10 livres ; celle de l’ours, de la loutre et du raton : 5 livres ; la peau d’ourson, 2 livres et demie (6) ; celle du loup, 2 livres ; de la marthe, 45 sols ; du renard, 35 sols (6).
Au début du XVIIIe siècle, vers 1710, les denrées principales se vendaient à peu près aux prix suivants : le beurre salé, 10 sols ; le beurre frais, 15 sols ; le melon d’eau, 5 à 6 sols ; les gros melons, de 15 à 20 sols ; le fromage de 1’Île d’Orléans, petit, mince, de forme ronde et de quatre morceaux la livre, 30 sous la douzaine (5). Et pour cuire tous ces ingrédients, un poêle coûtait 100 livres (7).
Références :
Gérard Filteau, LA NAISSANCE D’UNE NATION, éditions de l’Aurore, 1978, 1651, rue St-Denis, Montréal :
(1): p. 191
(2): p. 192
(3): p. 245
(5): p. 246
(6): p. 205
(7): p. 277
Russel Bouchard. LES ARMURIERS DE LA NOUVELLE-FRANCE, Ministère des affaires culturelles, Québec. 1978, Série Art et Métiers.
(8): p. 24
*****
Les photos ont été ajoutées lors de la mise en page Web de l’article et ne faisaient donc pas partie de l’article original.
Cliquez ici pour retourner à la page d’accueil du site pour lire ou relire d’autres articles.





Une réponse à « La valeur de la monnaie au XVIIe et XVIIIe siècle »
[…] fait nous-mêmes il y a quelques jours sur ce site en osant vous montrer l’apparence de notre premier numéro en 1979, il faut faire preuve d’humilité. En montrant tout le chemin parcouru, cela commence par nos […]
J’aimeJ’aime