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La biographie de Jérôme-Adolphe Chicoyne – Épisode 8

Dans ce huitième épisode, on nous présente les deux modèles de Chicoyne : l’Abbé Jean-Baptiste Chartier, curé de Coaticook et agent de colonisation du gouvernement pour les Cantons-de-l’Est, qui donnera d’ailleurs son nom au village de Chartierville et, John Henry Pope, un brillant homme d’affaires de la région. Né dans le canton d’Eaton en 1819, il deviendra plus tard député fédéral du comté de Compton pendant de nombreuses années, y compris dans le premier parlement qui suit la confédération de 1867 et deviendra également ministre de l’agriculture et ensuite ministre des Chemins de fer et des Canaux.

Cette série est tirée du livre de Denis Beaulieu:  »Jérôme-Adolphe Chicoyne, avocat, journaliste. agent d’immigration et de colonisation, entrepreneur, développeur, maire, député ».

Temps de lecture estimé – 11 minutes

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Ses modèles: L’Abbé Jean-Baptiste Chartier et John Henry Pope

Le Rév. Messire Chartier était l’abbé Jean-Baptiste Chartier, curé de Coaticook et l’agent de colonisation du gouvernement pour les Cantons-de-l’Est.

L’abbé J.-B.-A. Allaire, dans son Dictionnaire du Clergé canadien-français, écrit que Jean-Baptiste Chartier était né, le 14 mai 1832, à la Présentation, dans le comté de Saint-Hyacinthe. Il était le fils de Joseph Chartier, cultivateur et de Marguerite Chenette. Il fit ses études au Séminaire de Saint-Hyacinthe et fut ordonné dans sa paroisse natale par Mgr M. Blanchet, le 12 octobre 1856. Au Séminaire, il fut professeur de 1856 à 1860 et directeur des élèves de 1860 à 1862.

L’abbé Jean-Baptiste Chartier. Source: Collection de la Société d’histoire de Sherbrooke, IS4 CV 41A 1.

De son côté, en 2003, l’abbé Gilles Baril, le curé de la paroisse Saint-Edmond de Coaticook, dans son livre : Les pierres angulaires de notre Église, écrivit[i] :

Prêtre-professeur au Séminaire de St-Hyacinthe, il est envoyé à Sherbrooke en 1862 en vue d’y fonder un collège classique. Après avoir jugé que cette fondation est prématurée, il est nommé curé-résidant de Compton avec la responsabilité des diverses missions de la région. Il a 31 ans : l’âge des grands défis. De 1863 à 1868, il est curé de Compton puis il viendra fonder la nouvelle paroisse de Coaticook où il sera curé de 1868 à 1877. Il est desservant de St-Herménégilde, Ste-Edwidge, St-Venant, St-Malo, Ste-Suzanne de Stanhope et Island Pond (USA). Il voyage à cheval, été comme hiver. Pour l’aider dans son ministère, l’évêque lui affecte un prêtre-vicaire. À la fondation du diocèse de Sherbrooke en 1874, deux seules paroisses auront un curé et un vicaire à leur service : Sherbrooke et Coaticook.

Étant donné le bon travail du curé Chartier, le gouvernement provincial le nomme ainsi qu’Adolphe Chicoyne (qui deviendra maire de Sherbrooke, député et ministre provincial), agent de développement de la colonisation des Cantons de l’Est. La fondation de la paroisse St-Jean-Baptiste de Chartierville témoigne du travail de notre premier curé.

En 1868, Coaticook compte 25 maisons (10 familles canadiennes françaises catholiques). En peu de temps, le curé organise une maison d’éducation et il convainc les sœurs de la Présentation-de-Marie de venir s’en occuper. Arrivée des religieuses en 1876. Puis, il fait ouvrir des rues et il contribue à créer une « coopérative d’habitations » de sorte qu’en 1874, il y aura chez nous 250 familles pour une population totale de 1250 personnes (presque tous des Canadiens-Français).

Le curé ouvre un magasin général et fait construire trois scieries. Il veut éviter à ses paroissiens d’être à la merci de patrons anglais. Il est patriotique, le bon abbé Chartier. Toutes ces fondations, le couvent, l’église et le presbytère sont au nom personnel du curé car la paroisse n’a pas encore de statut légal et officiel.

En 1877, crise économique. Le curé craint le pire. Il vend ses moulins à scie à des industriels de Montréal. Ceux-ci prennent le curé comme « endosseur » à leur « hypothèque ». Le curé leur fait confiance mais le pire arrive. D’autres industries, des nouveaux propriétaires, entraînent la faillite des usines de Coaticook. L’église, le presbytère et le couvent passent dans la faillite. Par peur d’être blâmé et rejeté par les gens, le curé quitte Coaticook sur cet échec financier.

Toutefois, son tempérament d’apôtre, sa belle humeur constante et son affabilité proverbiale font en sorte que tous regrettent longtemps leur curé. Il a laissé chez nous la marque d’un homme agréable, optimiste, causeur agréable et habile à susciter la collaboration des autres. Le curé Chartier fera du ministère paroissial pendant trois années [curé de Saint-Ignace-de-Stanbridge (1877-1878) et de Sainte-Madeleine (1878-1880)] puis il retournera à l’enseignement au séminaire de St-Hyacinthe en 1880. Il devient directeur des élèves et procureur du Séminaire (jusqu’en 1894). Il décède le 22 avril 1917 à l’âge de 84 ans.

L’abbé Jean-Baptiste Chartier fut considéré comme le curé Labelle des Cantons-de-l’Est. En 1871, sous les auspices du Gouvernement de la Province de Québec, il publia une brochure de 96 pages : La Colonisation dans les Cantons de l’Est. Cette brochure était destinée à fournir aux colons toutes les informations nécessaires pour pouvoir s’établir sur une nouvelle terre réservée aux sociétés de colonisation[ii].

L’autre personnage, M. Pope, propriétaire de la mine d’or, était nul autre que John Henry Pope de Cookshire. P. B. Waite en a fait une description biographique très complète dans le Dictionnaire biographique du Canada[iii]. Voici les grandes lignes de ce texte.

John Henry Pope, naquit le 19 décembre 1819, à Cookshire, dans le canton d’Eaton. Il était le fils de John Pope et de Sophia Laberee. Le 5 mars 1845, il épousa Percis Maria Bailey et ils eurent trois enfants, dont deux parvinrent à l’âge adulte. J.H. Pope fut un fermier dont la grande ambition était d’avoir la meilleure ferme du district. En vertu de la loi de la milice de 1855, il fut nommé capitaine de la Cookshire Troop of Volunteer Militia Cavalry. J.H. Pope était un antiaméricain, et il prit fermement position contre le mouvement annexionniste qui se manifestait alors dans les Cantons-de-l’Est.

En politique, J.H. Pope fut un libéral-conservateur, Aux élections fédérales de 1857-1858, il fut élu député du comté de Compton, sans opposition, puisque l’ancien député ne se représenta pas. Jusqu’à sa mort survenue en 1889, il représenta, sans interruption, le comté à l’Assemblée de la province du Canada et à la Chambre des Communes. J.H. Pope fut l’un des principaux ministres dans les gouvernements de sir John A. Macdonald. Il fut ministre de l’Agriculture à plusieurs reprises et ministre des Canaux et Chemins de fer.

John Henry Pope. Source: Library and Archives Canada/MIKAN 3471474 – La photo a été ajoutée pour les besoins de cet article Web et n’était pas dans la biographie originale de J.A. Chicoyne.

J.H. Pope fut un brillant homme d’affaires. En société avec Cyrus S. Clarke, de Portland, Maine, il fut propriétaire de la Brompton Mills Lumber Company qui exploitait de grandes scieries à Brompton Falls, comme on appelait Bromptonville à cette époque. Il fut membre du conseil d’administration de la Eastern Townships Bank, et ce, jusqu’à sa mort. En 1866, avec Andrew Paton, il fonda la ‘Andrew Paton & Co’. de Sherbrooke, dans le but d’exploiter une usine de lainages. En 1872, la manufacture employait 500 ouvriers. De plus, il fit partie du conseil d’administration de la ‘’Sherbrooke Gas and Water Company’’ et de la ‘’Compton Colonization Society’’. Il fut aussi président honoraire et l’un des gros actionnaires de la ‘’Eastern Townships Agricultural Association’’.

Maison Pope à Cookshire, construite en 1880 – Collection Denis Beaulieu.

Voici ce que P.B. Waite écrit concernant la mine d’or de J.H. Pope :

 À la fin des années 1850, Pope avait commencé à s’intéresser à l’exploitation des mines de cuivre dans le canton d’Ascot, comté de Compton ; au cours des années 1860, il acquit, dans le canton de Ditton, situé dans le même comté, des terres dont on tira de l’or jusqu’à leur épuisement presque complet au début des années 1890. Au cours des années 1870, on accusa Pope d’avoir obtenu 4 200 acres, dans le canton de Ditton, sous de fausses représentations, sinon d’une manière frauduleuse. Toutefois, une enquête menée par le gouvernement provincial, en 1877, blanchit Pope en concluant qu’il avait acheté ces terres d’un homme qui les avait lui-même acquises sans payer les droits habituels d’établissement et sans que fussent réservés les droits coutumiers de la couronne sur les mines d’or. Il existe des indices qui permettent de croire que la forme des lettres patentes fut modifiée pour la circonstance et que Pope avait probablement acquis ces terres légalement, bien qu’à la limite de la légalité, sans compter que l’enquêteur nommé par la province fut Richard William Heneken, un collègue de Pope au sein de plusieurs conseils d’administration de compagnies des Cantons de l’Est. On peut présumer que Pope était conscient de s’en être tiré à bon compte. Il allait constamment porter une grosse chaîne en or, et aurait l’habitude de dire : « J’ai travaillé bien des années pour acquérir cette chaîne – et encore l’ai-je obtenue au prix de gros. »

C’est précisément de cette mine d’or dont parla, en 1870, J.A. Chicoyne dans son rapport annuel de la Société de Colonisation.

La construction de chemins de fer fut la plus significative des entreprises auxquelles travailla J.H. Pope. En 1870, il fonda la ‘’International Railway’’, une compagnie du chemin de fer qui reliait Sherbrooke à Mégantic. Il laissa presque sa santé et sa fortune dans cette aventure. En 1887, la compagnie fut absorbée par la compagnie de chemin de fer Canadian Pacific Railway.

À peine âgé de 70 ans, J.H. Pope qui avait ruiné sa santé dans les multiples affaires auxquelles il participa activement et dans la politique qui l’accapara constamment, décéda, d’un cancer du foie, le 1er avril 1889 à Ottawa. Deux semaines avant sa mort, il était toujours à son bureau de député.


[i] BARIL, Gilles Ptre. Les pierres angulaires de notre Église, Coaticook, Gilles Baril, 2003, pp. 25-27.

[ii] CHARTIER, Jean-Baptiste Ptre. La colonisation dans les Cantons de l’Est, St. Hyacinthe, Gouvernement de la Province de Québec, 1871, 96 p.

[iii] WAITE, P.B.. Pope John Henry, Dictionnaire biographique du Canada, Volume XI, 1881-1890, Toronto, University of Toronto/Université Laval, c1982, pp. 781-784.

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Dans le neuvième épisode, on nous parlera davantage de la mine d’or de John Henry Pope, au bout du chemin du canton de Ditton.

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