Voici un nouvel article sorti des archives de la revue L’Entraide généalogique à l’occasion du 45e anniversaire. L’auteur Raymond Lambert, un des membres fondateurs de la Société de généalogie des Cantons-de-l’Est, raconte les débuts de Saint-Élie d’Orford. Publié à l’origine en deux parties en 1981-1982, le texte est présenté ici en un seul article, plus condensé. Il n’a pas été modifié pour refléter la situation de 2023.
Temps de lecture estimé – 14 minutes
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SAINT-ÉLIE D’ORFORD
par Raymond Lambert
Municipalité du canton d’Orford, Saint-Élie fait partie du diocèse de Sherbrooke. Le village de Saint-Élie est situé sur ce qu’il est convenu « le vieux chemin de Montréal » (1) à sept ou huit milles de la ville de Sherbrooke.
Le chemin de Sherbrooke en droite ligne vers le lac Memphrémagog (aujourd’hui le boulevard Bourque) a été ouvert vers 1854 par une société qui avait établi un droit de péage. À l’intersection du chemin Saint-Élie actuel, il y avait une barrière et les conducteurs devaient payer 0,17$ pour une voiture simple et 0,25$ pour une voiture double.
Dan McIver a été un des pionniers de Saint-Élie; ses établissements se trouvaient en face de l’église actuelle. On trouve encore son nom sur un sceau de la paroisse et le bureau de poste de Saint-Élie porte son nom.
Mgr Racine, dans une lettre adressée aux fidèles de la mission d’Orford et datée du 20 mars 1882, donnera Saint-Élie comme patron de la mission. Selon un rapport sur la mission fait la même année par M. Millette, la mission compte 30 familles catholiques, soit 165 âmes. Avec une encaisse de 10,99$, Saint-Élie ne compte aucun édifice religieux. Dans son livre de recensement, M. Millette a inscrit les noms suivants : Frédéric et Laurent Lefebvre, J.G. Nagle, Jos. Parent, James et Edward Flynn, J.-B. Boudreau, René Fournier, Frs Jacques, Israel Bousquet, Jos. Pariseau, Godfroi Gilbert, Jos. Lavallée, Jacques Turgeon, Venelin Fortier, Frs Beaudoin, Camille Provost, Alexis Pelchat, Elzéar Parent, Béloni Fecteau, Léon Côté, Eusèbe Bédard, Étienne Proulx et quelques autres, tous pionniers de la paroisse.

Église St-Élie d’Orford
À l’automne de 1884, la mission était pratiquement abandonnée. Mgr Racine, accompagné de M. A.F. Dufresne, fait en novembre une tournée dans Orford par le chemin de Montréal jusqu’à l’établissement de M. W Doherty et de là par le rang Saint-Pierre, revenant par le chemin de Magog. Au cours du voyage, il rencontre plusieurs sinon tous les colons catholiques, qu’il convoque pour le 29 décembre dans la maison d’école près de M. Doherty. Séance tenante, on décide de bâtir une chapelle sur un terrain de six acres offert par M. McIver ; par la même occasion on nomme trois syndics : Bruno Delafontaine, Alexis Pelchat, et Alexandre Beaudet. Le projet de construction d’une chapelle devient réalité (2).
Cette chapelle sera érigée sur le chemin de Montréal dans le voisinage du rang VII d’Orford. Mesurant 40 x 32 pieds, elle sera construite durant l’été 1885. Le contrat de la charpente fut donné à J.-B. Pinette pour 120$ ; le solage à M. Bradford à raison de 0.75$ la verge pour un coût total de 31$ et les lambris, planchers et voûte à Antoine Gosselin pour 70$. Saint-Élie compte 73 familles pour 420 âmes à la visite paroissiale d’octobre 1885.
En l’été 1886, on construisit le presbytère. M. Antoine Gosselin fut le contracteur de cette bâtisse en bois qui mesurait 32 x 26 pieds, cuisine incluse. Ce même été, il construisit aussi la sacristie de la chapelle.
M. J.D.O. Godin, premier curé note dans son rapport de 1901 une population de 120 familles catholiques ou 680 âmes. Les bâtiments de la fabrique deviennent bientôt trop petits. On préparait un agrandissement mais on n’avançait à rien, Mgr Larocque refusant d’approuver le plan d’agrandissement.
Jeudi, 11 mai 1916, les prêtres du séminaire Saint-Charles revenant de Montjoie assistent à l’incendie de l’église et du presbytère de Saint-Élie. Le feu s’était déclaré dans une maison voisine et un fort vent le poussa sur l’église ; tout disparut en un rien de temps. Seules les Saintes-Espèces et la lampe du sanctuaire furent sauvées des flammes. Maintenant il faut bien reconstruire. Plus de discussions oiseuses (3).
Le premier mariage célébré en la chapelle de la nouvelle mission de Saint-ÉIie fut celui de Napoléon Poulin, fils d’Isaie Poulin et Anastasie Gilbert qui épouse Marie-Louise Audet, fille de Napoléon Audet et Valérie Desrosiers dite Lafrenière le 7 mars 1886. Ce mariage a été enregistré à la Cathédrale Saint-Michel de Sherbrooke. Les registres de Saint-Élie commencent en 1889.
ORIGINE DES PREMIÈRES FAMILLES DE SAINT-ÉLIE
Il convient d’abord de parler des premiers syndics nommés lors de la construction de la première chapelle. Il s’agit de MM. Bruno Delafontaine, Alexandre Beaudet et Alexis Pelchat.
Bruno Delafontaine, premier syndic que l’on nomme plus loin avec Maxime et France (François) Delafontaine, sont des frères originaires de St-Évariste de Frontenac. Laurent Delafontaine, veuf de Séraphine Beaudoin marié le 19 juillet 1892 à St-Évariste, serait un fils de François précédemment nommé, qui, devenu veuf épousa le 10 septembre 1900, Délia Trépanier, veuve de Pierre Ouellet. M. Bruno Delafontaine avait épousé Vitaline Tardif le 9 juin 1856 à St-Evariste.
M. Alexandre Beaudet aussi premier syndic s’était marié le 10 novembre 1863 à Notre-Dame de Bonsecours (Shefford) avec Marie-Ursule Gendron, fille d’Isidore Gendron et de Marie Latouche. Il faut savoir que c’est dans les paroisses du comté de Lotbinière que l’on retrouve les autres générations à l’exception du premier ancêtre au Canada, Jean Beaudet qui épouse Marie Grandin, une fille du Roi, le 28 septembre 1670 à Québec. L’ancêtre français était Bastien Baudet, époux de Marie Baudin ou Baudonnier du bourg de Blanzais (Vienne) évêché de Poitier (4). M. Pelchat, troisième syndic, épousa Odile Parent le 10 janvier 1871 à St-Évariste.
L’ancêtre de M. Jean-Baptiste Pinet qui avait entrepris la pose des planchers, murs et toiture (lambrissage), Pierre Finet s’était marié à Marguerite Michaud le 18 février 1765 à Saint-Louis de Kamouraska. Et l’ancêtre français Julien Pinet marié à Antoinette Cocralle vivaient à Charlendré en Avranches (Normandie). Ce Jean-Baptiste Pinet s’est marié trois fois. Son fils Édouard, époux de Marguerite Dubé, descendant de la première épouse Domithilde Gendron avait eu le malheur de mourir à son travail écrasé par un arbre.
Dès les débuts de Saint-Élie, on retrouve deux belges, deux frères semble-t-il. Lévinus Verpealst, époux d’Alexandrina Cornélis et Joseph Verpealst, époux de Marie Cornélis.
Deux grandes familles sont à l’origine de Saint-Élie, les Laliberté et les Dion. Neuf enfants issus du couple Pierre Laliberté et M-Alvina Audet, mariés le 7 juillet 1868 à St-Anselme de Dorchester firent souche à Saint-Élie d’Orford. Ce sont : Onésime Alphonse marié à Mary Jane Beaudette, Paméla mariée à Gédéon Dostie de Lambton, Pierre marié à Adèle Gosselin, Alfred marié à Eulalie Samson, Amanda mariée à François Dion, Vénérand marié à Zélia Dion, Marie Hénédine mariée à Pierre Fournier, Polydore marié à Marie Fournier, Philibert marié à Régine Fournier et en deuxième noces à Évelina Dion le 29 décembre 1919. Du couple David Dion et Obdulie Baillargeon qui se sont mariés à St-Vital de Lambton, (Frontenac), cinq enfants ont fait souche à Saint-Élie : Joseph marié le 8 septembre 1868 à Arthémise Laflamme, François qui a épousé Amanda Laliberté, Zélia mariée à Vénérand Laliberté, Amanda mariée à Lazare Bisson et Cyrille marié à Marie Bisson.
Mentionnons M. Adélard Berthelette marié à Alma Patient et Honoré Berthelette marié à Anna Patient; deux frères mariés aux deux soeurs. Les Berthelette venaient de Notre-Dame du Bonsecours. Alma et Anna Patient sont filles de Joseph Patient et d’Exilda Gendron. Les grands-parents Joseph Patient et Marie Lavallée s’étaient mariés à St-Joachim de Shefford le 21 octobre 1867. Plus tard, le nom de Patient deviendra Jasmin : Patient dit Jasmin. Enfin plus tard, il deviendra Lemoine dit Jasmin. L’ancêtre marié à Québec à Marie Olivier le 30 mai 1697 était originaire de St-Pierre Ensetelée d’Orléans en Orléanais.
À propos des mariages Berthelette-Patient, l’un d’eux, avancé en âge, me raconta, il y a une dizaine d’années qu’entre l’incendie qui détruisit la première église et la construction de la nouvelle, ils furent contraints de se marier au presbytère de la paroisse; c’était le 3 septembre 1917. Les ancêtres Berthelette étaient François Berthelette et Françoise Ravier d’Éris, diocèse de Genève en Suisse (5).

PROVENANCE DE QUELQUES FAMILLES
Mentionnons encore la provenance de quelques autres familles. Les épouses Saulnier descendent toutes de Jean Saulnier et soit Marie Morin sa première épouse ou encore Elisabeth Bernard sa deuxième épouse. Le mariage de Jean Saulnier et Marie Morin avait eu lieu à la cathédrale de Sherbrooke le 19 août 1867 et le mariage de Jean Saulnier et de sa deuxième épouse Elisabeth Bernard avait été célébré à St-Etienne de Bolton. On retrouve la génération précédente des Saulnier à Baie St-Paul avec Thomas Saulnier et Marie Thérèse Boivin. On pourra remonter trois générations de Saulnier à Baie St-Paul avant de remonter en Acadie. On peut donc dire que la famille est d’origine acadienne avec son ancêtre Pierre Saulnier qui épousa Marie Boudreault.
On peut retracer les origines des familles de St-Elie soit dans la Beauce ou Bellechasse ou encore dans les paroisses du comté de Lotbinière ou de Bonsecours dans le comté de Shefford. Quelques familles sont cependant originaires de la Baie-du-Febvre, de St-François du Sud, de St-Anaclet (Rimouski), ou de L’islet.
ALFRED DESROCHERS

Nous terminerons cette brève étude des gens de St-Élie en soulignant que c’est dans le sixième rang nord de cette paroisse qu’en l’année mil neuf cent un, le six octobre, que naquit celui qui allait plus tard devenir le poète des Cantons de l’Est, Joseph Alfred Desrochers, issu du mariage de Honorius Desrochers et Zéphirine Marcotte. Sa renommée n’est plus à faire. Ses oeuvres sont nombreuses et témoignent abondamment de la qualité et de la finesse de sa poésie.
Références
(1) Continuation du chemin Gosford par les cantons d’Orford, Stukely et Granby vers Chambly et Longueuil.
(2) La requête pour la construction d’une chapelle porte une trentaine de signatures ; nous y trouvons les noms de 1882 et quelques nouveaux : Joseph David, G. Lamontagne, Magloire Baillargeon, Pierre Therrien, Baptiste Pinette, Bruno, Maxime et Francis Delafontaine, Joseph Ruel.
(3) Résumé des notes de Mgr Albert Gravel, Messager St-Michel, déc. 1959.
(4) Institut Drouin, Dictionnaire des familles canadiennes (1608-1670)
(5) Ibid.
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