Dans ce dixième épisode, l’histoire se déplace vers Saint-Hyacinthe et Montréal où J.A. Chicoyne est assigné comme agent d’immigration et de colonisation.
Cette série est tirée du livre de Denis Beaulieu: »Jérôme-Adolphe Chicoyne, avocat, journaliste. agent d’immigration et de colonisation, entrepreneur, développeur, maire, député ».
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CHAPITRE 3
1872-1879, SON TRAVAIL D’AGENT D’IMMIGRATION ET DE COLONISATION
Au cours des premières années de sa carrière, Jérôme-Adolphe Chicoyne, même s’il pratiquait la profession d’avocat à Saint-Hyacinthe, s’intéressa grandement à la colonisation et, en 1868, il fut nommé secrétaire-trésorier de la Société de Colonisation de Saint-Hyacinthe. Cet intérêt le poussa à solliciter un emploi d’agent du gouvernement pour s’occuper de l’immigration et de la colonisation. D’abord agent à Saint-Hyacinthe, puis à Montréal, il fut finalement nommé agent d’immigration chargé d’appliquer la Loi du rapatriement à La Patrie, en 1875.

J.A. Chicoyne, 1873. Source: Centre d’histoire de Saint-Hyacinthe, Fonds Jérôme-Adolphe-Chicoyne.
SES ASSIGNATIONS À SAINT-HYACINTHE ET À MONTRÉAL
En tant que secrétaire-trésorier de la Société de Colonisation de Saint-Hyacinthe, J.A. Chicoyne était en constante relation avec le Département de l’Agriculture et des Travaux publics à Québec et avec l’agent de colonisation des Cantons-de-l’Est, l’abbé Jean-Baptiste Chartier, curé à Coaticook. Le 23 février 1872, J.A. Chicoyne fut nommé par le gouvernement provincial agent d’immigration à Saint-Hyacinthe, au salaire de 1 200 $ par année, soit 100 $ par mois, ce qui était un bon revenu annuel pour l’époque.
Dès le mois d’octobre 1872, le projet de loi sur le rapatriement des Canadiens émigrés aux États-Unis était en élaboration. L’abbé J.B. Chartier écrivit, le 25 octobre, à J.A. Chicoyne et lui envoya les propositions qu’il venait de faire au ministre de l’agriculture[i]. À partir de ce moment, J.A. Chicoyne consacra toutes ses énergies à ce grand projet de rapatriement. Dès le mois de février 1873, J.A. Chicoyne prévoyait faire une tournée, au cours de l’été, dans les États du Nord-Est américain : New York, Connecticut, Rhode Island et New Hampshire. Il faut bien comprendre que la Société de Colonisation de Saint-Hyacinthe avait une grande réserve de lots dans le canton d’Emberton qui pouvaient être vendus aux colons rapatriés. Donc, J.A. Chicoyne avait intérêt à s’occuper rapidement du projet. Mais il n’a pas pu mettre son projet à exécution. Le 27 juin 1873, le lieutenant-gouverneur approuva la décision du Conseil exécutif de nommer J.A. Chicoyne agent d’immigration à Montréal, avec une augmentation de salaire de 200 $. Voici ce que spécifiait le rapport[ii] :
… L’Honorable Commissaire recommande que J.A. Chicoine, Esc. nommé agent à St-Hyacinthe, par Ordre en Conseil no. 45 du vingt et un Février mil huit cent soixante et douze, et remplissant provisoirement, depuis trois mois, les fonctions d’agent d’immigration à Montréal, soit nommé Agent en titre avec un traitement annuel de quatorze cents piastres ($ 1400.00) au lieu de douze cents ($ 1200.00) qu’il recevait déjà, et ce, à compter du premier Juillet prochain, le dit J.A. Chicoine devant continuer à s’acquitter des devoirs qui lui sont imposés par l’Ordre en Conseil ci-dessus cité, et en outre travailler au repatriement des Canadiens émigrés aux États-Unis, autant que cela pourra être compatible avec le bon accomplissement de ses fonctions d’agent d’immigration en chef à Montréal.
L’Honorable Commissaire, afin de permettre au dit J.A. Chicoine de donner une partie de son temps à l’œuvre de repatriement et aux fonctions qui lui sont assignées par le dit Ordre en Conseil no. 45, recommande de plus que Benjamin Abbotson, Esc. de la Cité de Montréal soit nommé Sous-agent d’immigration à Montréal, avec un traitement annuel de douze cents piastres ($ 1200.00), à compter du premier de Juillet prochain, pour agir de concert avec M. Chicoine et sous sa direction. …
Par cette nouvelle nomination, J.A. Chicoyne pensa être en position d’influencer et de faire progresser le projet de rapatriement des Canadiens. Toutefois, le 11 juillet 1873, S. Lesage du Département de l’Agriculture écrivit à J.A. Chicoyne de ne pas faire immédiatement sa tournée des États du Nord-Est américain car « il y a actuellement devant le Conseil Exécutif un excellent projet pour le repatriement … [iii]». De plus, le dossier commençait à traîner en longueur et le projet de loi était continuellement reporté. Ainsi le 20 octobre 1874, J.A. Chicoyne écrivit à S. Lesage du Département de l’Agriculture et demanda d’être réintégré dans son ancien poste d’agent à Saint-Hyacinthe et lui laissa entendre qu’il pensait à démissionner en tant qu’agent du gouvernement.

J.A. Chicoyne, l’agent de colonisation. Collection Andrée Benoît et Richard Flibotte.
Le 24 novembre 1874, le Lieutenant-gouverneur approuva la décision du Conseil exécutif de réintégrer J.A. Chicoyne dans son ancien poste à Saint-Hyacinthe. Voici ce que dit le document[iv] :
… Que J.A. Chicoine, Esc. Agent d’immigration à Montréal, désire être déchargé de la responsabilité de cette agence et conserver seulement les fonctions qui lui avaient été assignées par l’Ordre en Conseil no. 45, du vingt trois Février mil huit cent soixante et douze et qu’il est expédient d’accéder à sa demande.
L’Honorable Commissaire recommande en conséquence que M. Chicoine continue à remplir la mission temporaire qui lui a été assignée par l’Ordre en Conseil précité, avec traitement sur le pied de douze cents piastres par année, à compter du premier de Décembre prochain et que B. Abbotson, sous-agent d’immigration à Montréal demeure jusqu’à nouvel ordre chargé de l’Agence d’Immigration de Montréal, sans rien changer à son titre ni à son traitement [v]. …
Pourquoi J.A. Chicoyne demanda-t-il d’être réintégré dans son poste à Saint-Hyacinthe ? À mon avis, il y a deux raisons qui l’ont poussé à faire cette demande. Premièrement, en raison de la situation difficile que sa famille avait eu à traverser au cours des dernières années, il voulait sûrement être plus près de sa femme et de sa seule fille, Émélie. Vivre éloigné de la famille devait être assez pénible pour tout le monde. Deuxièmement, J.A. Chicoyne était toujours en contact avec le curé J.B. Chartier de Coaticook qui s’occupait ardemment du projet de rapatriement des Canadiens et aussi avec les autorités du Département de l’Agriculture et des Travaux publics à Québec. Donc, J.A. Chicoyne savait que l’acceptation du projet de la Loi sur le rapatriement était imminente et il était de plus en plus intéressé à s’occuper de son application, sachant à l’avance que le projet se réaliserait dans les cantons de Ditton, Chesham et Emberton. Ainsi, en étant dans un poste moins important que celui de Montréal, il lui serait plus facile d’être nommé agent d’immigration et de colonisation pour l’application de la Loi sur le rapatriement.

Carte des cantons de Ditton et d’Emberton. Source : Collection Alfred Labbé. Photo : Denis Beaulieu, 2009.
[i] CENTRE D’HISTOIRE DE SAINT-HYACINTHE. Fonds Jérôme-Adolphe-Chicoyne : CH008/000/000/004.034 : Lettre de l’abbé J.B. Chartier à J.A. Chicoyne.
[ii] CENTRE D’HISTOIRE DE SAINT-HYACINTHE. Fonds Jérôme-Adolphe-Chicoyne : CH008/000/000/004.043 : Copie du rapport du Conseil exécutif du 23 juin 1873, Québec.
[iii] CENTRE D’HISTOIRE DE SAINT-HYACINTHE. Fonds Jérôme-Adolphe-Chicoyne : CH008/000/000/004.040 : Lettre de S. Lesage à J.A. Chicoyne.
[iv] CENTRE D’HISTOIRE DE SAINT-HYACINTHE. Fonds Jérôme-Adolphe-Chicoyne : CH008/000/000/047 : Copie du rapport du Conseil exécutif du 20 novembre 1874, Québec.
[v] CENTRE D’HISTOIRE DE SAINT-HYACINTHE. Fonds Jérôme-Adolphe-Chicoyne : CH008/000/000/004.047 : Copie du rapport du Conseil exécutif du 20 novembre 1874, Québec.
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Dans le onzième épisode, J.A. Chicoyne sera assigné à Sherbrooke.
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