Dans ce nouvel épisode, ses activités d’agent de colonisation ayant pris fin, J.A. Chicoyne diversifie ses activités et se rapproche de Sherbrooke.

Cette série est tirée du livre de Denis Beaulieu:  »Jérôme-Adolphe Chicoyne, avocat, journaliste, agent d’immigration et de colonisation, entrepreneur, développeur, maire, député ».

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J.A. Chicoyne fut toujours très actif au niveau social et municipal, mettant sur pied toutes sortes de comités et d’organismes. En décembre 1877, il fut l’un des sociétaires du Cercle agricole de La Patrie[1] et le 13 janvier 1878, il fut nommé président du « Comité du Chemin de fer, des États-Unis à La Patrie »[2]. Sur la proposition de J.A. Chicoyne, P. de Lanoue a été nommé secrétaire. A. Gendreau, Victor Chartier curé, M. Thibault, G. Labonne père et H. Smith ont été nommés membres du dit Comité.

Le 3 mars 1879, il démissionna comme Juge de paix puisqu’il avait l’intention de déménager à Sherbrooke afin d’y établir un bureau d’avocat et de pouvoir continuer à faire vivre sa famille.

Le 6 mai 1879, J.A. Chicoyne écrivit à sa femme, Caroline, une lettre dans laquelle il disait[3] : J’ai loué un bureau $5 par mois, je viens d’y installer une table et quatre chaises de seconde main et comme premier acte d’inauguration je t’écris ces quelques lignes. Je ne puis encore rien dire de la perspective; tout est entre les mains de la Providence que je vais implorer en assistant à la messe et au mois de Marie.

J’ai un petit bureau composé de deux pièces au second; ce sont des apartements très confortables. Mon bureau est sur la rue Wellington voisin du magasin de Coderre. …

Le 10 mai suivant, un de ses amis de La Patrie, P. de Lanoue, lui écrivit ces quelques mots[4] : Je suis allé à La Patrie mercredi dernier, j’espérais avoir le plaisir de vous voir.

Monsieur Lalime m’a appris que vous quittiez La Patrie, pour vous installer à Sherbrooke. Je regrette sincèrement que vous nous abandonniez à notre malheureux sort.

…

Vous allez rire de ma demande sans aucun doute : Je désirerais que vous me laissassiez votre paire de sabots, quand je les chausserai, je ne pourrai faire autrement que de penser à vous.

Mes compliments à Madame. Votre tout dévoué

P. de Lanoue

Mais « Madame » était toujours à La Patrie. Encore une fois, la famille était séparée : le mari à un endroit et la femme et la petite, à un autre. Combien de temps cette séparation allait-elle encore durer ?

La Patrie en 1880 [7]

À Sherbrooke, J.A. Chicoyne s’occupa de son bureau, évidemment, mais il s’occupa aussi de journalisme. Il reprit contact avec le rédacteur du journal Le Pionnier, H.C. Cabana, afin d’y soumettre régulièrement des articles. Même s’il était à Sherbrooke, il demeura toujours très impliqué dans les affaires de La Patrie et la colonisation l’intéressait toujours, car il mijotait un autre plan de développement.

J.A. Chicoyne fut un « développeur », un patriote qui voulut occuper tout le territoire national. Il s’intéressa à tout ce qui pouvait favoriser le développement de la colonisation et il étudia à fond toutes les possibilités et toutes les expériences qu’il pouvait trouver ailleurs.

C’est ainsi qu’il prit une part active dans la Société de Colonisation de Sherbrooke que Monseigneur Antoine Racine, l’évêque de Sherbrooke, avait fondée dans le but de contrecarrer l’action des compagnies de colonisation britanniques dans la région du lac Mégantic[5]. Cette société avait obtenu la concession de plusieurs lots dans le canton de Woburn. Il s’agissait maintenant d’y développer la colonisation. Telle fut la mission que s’est donné J.A. Chicoyne.

Pour ce faire, J.A. Chicoyne organisa une grande tournée de l’Europe afin d’aller y recruter des colons et, surtout, des investisseurs qui pourraient financer la colonisation du canton de Woburn. Ce sera sa période d’homme d’affaires et de développeur.

Voici comment l’abbé Élie-J. Auclair, dans son livre Figures canadiennes, résume le travail de colonisateur de J.A. Chicoyne[6] : … Dans la région des Cantons de l’Est, de 1872 à 1900, il travailla avec un zèle inlassable à la grande œuvre de la colonisation. Les pas et les démarches ne lui coûtaient pas. Il prit hardiment de nombreuses initiatives. Il publia maintes brochures, bien faites, solidement ‘’charpentées’’, qu’on peut encore de nos jours consulter avec profit. Quatre fois, dans l’intérêt de cette œuvre de la colonisation, il fit le voyage d’Europe. La première fois, ce fut en 1880. Il donna des conférences et publia des études substantielles, sur les ressources du Canada, en Angleterre, en France, en Belgique, en Suisse et en Italie. Ayant fait le pèlerinage de Lourdes avec des citoyens de Nantes, il les intéressa à son œuvre, fonda et organisa avec quelques-uns d’entre eux la Compagnie nantaise de colonisation au Canada, dont les opérations se localisèrent, vers 1881, au lac Mégantic et dans les environs. Le succès ne fut peut-être pas très brillant, mais l’effort était certainement des plus louables.

Sans cesse, en remplissant ses fonctions d’agent du gouvernement, Chicoyne eut le souci d’imprimer à ses fondations de centres divers un cachet nettement catholique. Comme le curé Labelle, dont il fut un peu l’émule laïque, sous la haute direction de Mgr Racine, et en collaboration avec les missionnaires ou les curés, il colonisait par la paroisse, la vraie cellule de la vie sociale chrétienne.

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[1] CENTRE D’HISTOIRE DE SAINT-HYACINTHE. Fonds Jérôme-Adolphe-Chicoyne : CH008/000/000/002.010 : Décembre 1877, document contenant une liste de sociétaires du Club agricole de La Patrie. 3 p.

[2] CENTRE D’HISTOIRE DE SAINT-HYACINTHE. Fonds Jérôme-Adolphe-Chicoyne : CH008/000/000/002.026 : 13 janvier 1878, document contenant le procès-verbal d’une réunion du Comité agricole de La Patrie faisant état de la création du Comité du chemin de fer des États-Unis à La Patrie. 1 p.

[3] CENTRE D’HISTOIRE DE SAINT-HYACINTHE. Fonds Jérôme-Adolphe-Chicoyne : CH008/000/000/006.008 : 6 mai 1879, lettre de J.A. Chicoyne à sa femme qui est à La Patrie, 4 p.

[4] CENTRE D’HISTOIRE DE SAINT-HYACINTHE. Fonds Jérôme-Adolphe-Chicoyne : CH008/000/000/006.005 : 10 mai 1879, lettre de P. de Lanoue à J.A. Chicoyne concernant son départ de La Patrie, 1 p.

[5] LITTLE, John I. Les investisseurs français et le nationalisme canadien-français – La Compagnie de Colonisation et de Crédit des Cantons de l’Est – 1881-1893, dans Revue d’histoire de l’Amérique française, Vol. 32, no 1, juin 1978, p. 21.

[6] AUCLAIR, Élie-J. abbé. Figures canadiennes – Deuxième série -, Montréal, Éditions Albert Lévesque, 1933, p. 192.

[7] Andrée Benoît et Richard Flibotte, collection privée, Saint-Hyacinthe, (Photo tirée de l’album personnel de J.A. Chicoyne, p. 49). Il est à noter que la photo originale de l’album avait été développée en sens inverse. Ici nous voyons la photo dans le bon sens.

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Dans le prochain épisode, au début des années 1880, J.A. Chicoyne développe ses projets d’affaires et de développement.

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