Il y a quelques mois, je publiais le premier volet de l’histoire de mes quatre familles: celle de la famille Langlois du côté maternel. Un livre de près de 700 pages en 35 chapitres. Le fruit de près de 4 ans de recherches et d’écriture. Rien de bien particulier en soi puisque de nombreux membres consacrent de façon similaire des années d’efforts pour raconter l’histoire de leurs propres familles.
Question d’encourager d’autres membres à venir publier des extraits de leurs propres écrits – soit dans L’Entraide généalogique ou dans L’Entraide numérique – nous avons publié il y a quelques semaines le chapitre 17 de ce premier tome intitulé »Neuville 2022 » consacré à ma visite il y a trois ans de la terre de mes premiers ancêtres Langlois, située à Neuville près de Québec. Ce qui est particulier avec cette terre familiale c’est qu’elle a été transférée de génération en génération depuis 1667. Une douzaine de générations, sans interruption, de père en fils. Elle appartient toujours à la famille Langlois de nos jours. On peut retourner aux deux volets de cette première série en cliquant ici.
Nous vous présentons maintenant en quatre volets le chapitre suivant – le 18 – qui raconte la vie de ce premier ancêtre, Nicolas Langlois. Ces textes ont récemment été publiés par la revue Le Chemin du Roy de la Société d’histoire de Neuville. L’histoire de Nicolas Langlois est aussi une portion importante de leur histoire. En fait, la famille Langlois représente l’une des quinze familles d’origine qui sont toujours membres de cette communauté plus de 300 ans plus tard, d’une génération à l’autre.
Ceci est le deuxième de ces quatre articles. Nous publierons les deux prochains volets de cette série d’articles au cours des prochains jours.
Temps de lecture estimé – 13 minutes
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2e partie du chapitre 18 – Notre ancêtre Nicolas Langlois
4 – Élisabeth Cretel – Fille du Roy
La mention d’Anne Gasnier plus tôt dans ce chapitre a une importance centrale dans l’histoire de notre famille. À la mort de sa première épouse. Jean Bourdon l’épousera donc en secondes noces. Étant très impliquée dans l’arrivée des Filles du Roy, Neuville deviendra un foyer important de Filles du Roy. On a déjà vu aux chapitres 10 et 11 que Nicolas Langlois choisira Élisabeth Cretel comme épouse, une Fille du Roy arrivée en Nouvelle-France en 1671. Sa présence à Neuville n’est effectivement pas anodine. N’eut été d’Anne Gasnier, Élisabeth Cretel n’aurait probablement jamais rencontré Nicolas Langlois et nous ne serions pas ici pour en parler.

Carte historique montrant la terre ancestrale de Nicolas Langlois, encadrée en noir gras, dans la Seigneurie de Dombourg qui donne sur le fleuve Saint-Laurent.
Le site de la Société d’histoire de Neuville précise le lien entre Anne Gasnier et ces Filles du Roy, et qui explique comment notre Élisabeth Cretel va se retrouver à Neuville dès son arrivée à Québec :
‘’L’épouse du Seigneur de Neuville, Jean Bourdon, Anne Gasnier s’est dévouée à la cause d’amener des Filles du Roy en Nouvelle-France et elle fit en sorte que de nombreuses Filles du Roy vinrent prendre mari à Neuville. En fait, Neuville est l’endroit en Nouvelle-France où par rapport à la population, il y a eu le plus de mariages avec des Filles du Roy. Plus de 48 Filles du Roy y trouvent mari chez les habitants de Neuville.’’
Ce nombre est considérable si on se rappelle qu’au terme des dix années du programme des Filles du Roy en 1673, il n’y a eu au total qu’environ 760 Filles du Roy réparties sur tout le territoire de la Nouvelle-France. Que Neuville ait reçu 48 Filles du Roy à lui seul indique bien l’influence d’Anne Gasnier durant ces années et explique comment Élisabeth Cretel fera ensuite partie de notre famille en épousant Nicolas Langlois la même année.
Sans vouloir se répéter concernant l’arrivée d’Élisabeth Cretel en Nouvelle-France, éléments que j’ai déjà couvert au chapitre 11, résumons quand même l’essentiel tout en ajoutant d’autres informations additionnelles.
Élisabeth Cretel est née vers 1649 au centre-ville de Rouen – une autre Normande tout comme son futur époux – dans la paroisse de Saint-Maclou. Elle est la fille de Guillaume Cretel et de Jeanne Godfroy. Elle s’engage comme Fille du Roy au début de 1671 alors qu’elle a 22 ans. Elle quitte donc la France par le port de La Rochelle le 26 juin 1671 à bord du navire Prince Maurice qui semble être utilisé pour la première fois pour la traversée de Filles du Roy. Il s’agit de la principale traversée de l’année 1671 pour ce programme alors que le navire transporte environ 85 Filles du Roy.
Le navire arrive à bon port à Québec le 30 juillet après une escale à Percé le 15 juillet. Après vérification sur le site naviresnouvellefrance.net qui rend compte des traversées de l’Atlantique de cette époque, il semble qu’Anne Gasnier ne faisait pas partie du voyage pour guider ce nouveau contingent de Filles du Roy bien que sa présence à ce titre était régulière, particulièrement au cours des trois années précédentes. Le site indique cependant qu’Anne Gasnier était tellement ‘’investie’’ dans la protection de ‘’ses filles’’ qu’elle aurait assisté comme témoin à pas moins de 304 conventions matrimoniales signées de 1663 à 1673, soit pendant la durée totale du programme des Filles du Roy. Les deux tiers de ces unions ont eu lieu en 1668, 1669 et 1670.
Arrivée à Québec à la fin de juillet, Élisabeth se voit dirigée vers Neuville par Anne Gasnier où elle rencontrera rapidement Nicolas Langlois. Les fréquentations ne s’éterniseront pas comme c’était la coutume à l’époque. La plupart des mariages avaient lieu à l’automne lorsque des contingents de Filles du Roy arrivaient en Nouvelle-France. La pression était forte pour trouver mari rapidement avant l’arrivée de l’hiver.
Le mariage est donc célébré en l’église Notre-Dame de Québec le 26 octobre de la même année. Le couple s’installe rapidement sur la terre qui a été attribuée à Nicolas Langlois par le Seigneur Jean Bourdon en 1667. C’est cette même terre que leurs descendants continuent aujourd’hui de développer sur le Chemin du Roy à Neuville.
5 – Les débuts de Neuville
Le village de Neuville fut donc fondé en 1667. À ce moment, nous sommes environ 60 ans après l’arrivée des premiers colons en Nouvelle-France et la fondation de Québec par Samuel de Champlain. D’abord concentrés dans la région immédiate de Québec, les nouveaux arrivants s’étendront rapidement sur le territoire en suivant essentiellement le fleuve Saint-Laurent, principale voie de navigation praticable du temps. On disait alors que Neuville n’était ‘’qu’à une marée en canoë de Québec’’.
Neuville fait donc partie des premiers établissements en dehors de Québec et est situé à environ une quarantaine de kilomètres au sud-ouest de Québec. Le développement du village se fera parallèlement à celui de la nouvelle Seigneurie de Dombourg qui deviendra rapidement la Seigneurie de Neuville en 1680.

Acte de mariage entre Nicolas Langlois et Élisabeth Cretel le 26 octobre 1671 dans la paroisse Notre-Dame de Québec. Source : Généalogie Québec.
Dès cette époque et encore de nos jours, cette région offre des conditions très favorables pour l’agriculture, ce qui la rend attrayante pour les nouveaux colons. Elle est rapidement surnommée le ‘’grenier de la Nouvelle-France’’. Encore aujourd’hui, entre le fleuve et ce qui est devenu l’autoroute 40 – ou l’autoroute Jean-Lesage – au nord du fleuve, on peut noter la géographie du terrain en trois plateaux dont le premier (là où le village est situé) est au niveau de la mer, ce qui n’est pas toujours le cas en suivant la rive en partant de Québec où des escarpements constituent des obstacles naturels qui gênent l’accès à la rive. En ce sens, Neuville était bien situé. Ce positionnement géographique attrayant fera vite de Neuville un endroit de choix pour s’établir.
Bien que de nos jours, Neuville reste toujours un petit village historique bien paisible dans une région où le principal pôle de développement reste toujours la ville de Québec et ses banlieues immédiates, l’importance de Neuville dans cette région était plus significative durant les années où Nicolas Langlois va s’y établir pour fonder une famille. On dit que dès le recensement de 1681, Neuville comptait environ 400 habitants répartis entre 74 familles, certainement aidé par Anne Gasnier qui y avait amené près de 50 Filles du Roy dans son propre village. Ce nombre peut sembler peu mais au même moment, la Nouvelle-France dans sa totalité n’a que 9,677 individus. Parmi cette population, Québec compte 1,345 habitants tandis que Montréal (Ville-Marie) en dénombre légèrement plus, soit 1,418. Autour de Neuville, Grondines ne décompte que 55 habitants et 14 familles tandis que Deschambault n’a qu’une seule famille avec 12 personnes. Quant à Cap-Santé, où quelques enfants de Nicolas Langlois iront s’établir et qui fera l’objet du prochain chapitre, il ne compte que 3 familles pour un total de 31 habitants et ce, toujours selon le recensement de 1681. C’est dire l’importance de la communauté de Neuville qui devient vite un pôle de développement important à l’ouest de Québec.
La Seigneurie de Neuville aura un nouveau propriétaire au début de 18e siècle avec le Seigneur Nicolas Renaud d’Avesnes Désméloïses qui l’administrera entre 1716 et 1743. Elle changera donc à nouveau de nom et deviendra la Seigneurie de Pointe-aux-Trembles de Québec. Ce sera son nom définitif jusqu’à sa dissolution environ 150 ans plus tard au moment de l’abolition du régime des Seigneuries au Québec.
En fait, à travers les années, Neuville était une petite municipalité enclavée dans celle de Pointe-aux-Trembles. On retrouve donc ces deux noms à travers son histoire avec la confusion qui peut en générer, sans compter l’autre Pointe-aux-Trembles dans la région de Montréal. Finalement, Neuville et Pointe-aux-Trembles fusionneront en 1997 pour devenir Neuville qui compte de nos jours environ 4,000 habitants.
Ndlr: La suite dans le prochain article lundi.
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